En septembre 2018, 73.000 enfants et adolescents, en France, ont fait leur rentrée dans une école privée hors contrat. Quelles que soient les raisons des parents, ces écoles sont de plus en plus nombreuses. Notamment en Eure-et-Loir et dans le sud des Yvelines. Rencontre avec des familles qui on fait ce choix.
Selon ces parents, ce n’est pas une opposition farouche au système traditionnel mais bien le désir de vouloir faire autrement. Voilà ce qui les a poussés à faire le choix d’écoles privées “hors contrat” pour leurs enfants. Et même certains à se réunir pour en créer. C’est le cas de Madeleine de Gourcuff, maman de sept enfants, elle a contribué à fonder l’école Jacinthe et François, à Rambouillet.
Faire différemment
Ces établissements ne sont pas sous convention de l’Éducation nationale et ne perçoivent donc aucune subvention. En Eure-et-Loir et dans le sud des Yvelines, plusieurs établissements sont en place ou en projet. Qu’ils proposent un enseignement tourné vers la religion ou vers la nature, ces écoles n’adoptent pas certains codes de l’Éducation nationale.
« Mais nous devons rendre des comptes tout de même, les enfants doivent avoir le niveau pour obtenir le brevet à la fin de la troisième et le baccalauréat à la fin de la terminale », explique l’abbé Laurent Perret du Cray. Il dirige l’école des Jubelines, en centre-ville de Chartres. Elle propose une pédagogie « très traditionnelle pour former les intelligences, les enfants doivent avoir le sens et le goût de l’effort ».
C’est un peu la grève de dernière chance. Mercredi 29 mai, les syndicats Snes-FSU, FO, CGT, Snalc et le collectif des Stylos rouges ont appelé ensemble à une grève de la surveillance des examens le 17 juin, jour de l’épreuve de philosophie du baccalauréat. Le mois dernier, le Snes-FSU avait lancé une consultation en ce sens auprès de ses adhérents. Une première pour le syndicat majoritaire du secondaire. Résultat : 75 % des 5500 réponses obtenues (12 % des syndiqués) ont validé cette option. Dans le même temps, le Snes-FSU a écrit à Jean-Michel Blanquer pour demander a être rapidement reçu, afin d’obtenir une « ouverture » sur les rémunérations comme sur la réforme du lycée et du baccalauréat.
Depuis deux mois, l’opposition très large des enseignants aux réformes du ministre de l’Éducation n’a pas fait reculer le gouvernement, même si Jean-Michel Blanquer n’a pas exclut de différer une des mesures qui inquiète les instituteurs et les parents d’élèves : les regroupements école-collège. Pour autant, la réforme du lycée doit se mettre en place dans les établissements à la rentrée. Or, à ce jour, plusieurs journées d’action de 24 h et quelques tentatives souvent minoritaires de grèves reconductibles n’ont pas eu raison de l’agenda du gouvernement. Ni sur la réforme du lycée ni sur la loi « pour une école de la confiance » qui a été votée au Sénat le 21 mai.
Plusieurs syndicats enseignants appellent à une grève de la surveillance des examens le 17 juin, date du premier jour du bac, rapporte France Info ce mercredi.
Les premières épreuves du bac seront-elles surveillées le 17 juin prochain ? Le Snes (premier syndicat du second degré), le SNALC, la CGT et un collectif de Stylos Rouges appellent les enseignants à faire grève en refusant de surveiller les examens selon les informations de France Info. L'intersyndicale proteste contre la réforme du lycée et du baccalauréat et la loi "pour une école de la confiance" portée par le ministre de l'Éducation Jean-Michel Blanquer. Ils réclament également une revalorisation des salaires des personnels.
Les épreuves de philo et de français concernées
Le Snes-FSU avait annoncé lundi avoir lancé, en avril, une consultation auprès de ses adhérents pour savoir s'ils étaient prêts à cesser le travail le 17 juin. 12% des adhérents ont répondu et plus de 3/4 d'entre eux se disent favorables à cette grève de la surveillance.
Les épreuves de philosophie pour les élèves de Terminale, l'épreuve écrite de français pour les élèves de Première, mais aussi les épreuves de la première journée du brevet du collège, le 27 juin, pourraient être concernées par ce mouvement a précisé Frédérique Rolet, secrétaire générale du syndicat, à l'AFP. Les académies "les plus impliquées" sont Montpellier, Toulouse et Créteil, selon la responsable syndicale.
"Les réformes du bac et du lycée posent de gros problèmes"
Un projet de loi contre la démocratisation scolaire
Réforme du lycée et du baccalauréat, projet de loi pour une école de la confiance, instauration du principe de sélection à l’université… Depuis deux ans, le gouvernement a entrepris de bouleverser le modèle éducatif français. Son objectif ? Instaurer, de la maternelle à la faculté, un système concurrentiel au profit des élèves les plus « méritants ».
Si l’éducation nationale n’a jamais été très douée pour faire fonctionner l’ascenseur social, le projet de loi pour une école de la confiance, porté par le ministre Jean-Michel Blanquer, en a même abandonné l’ambition. L’objectif de démocratisation scolaire, définie comme la volonté de compenser les inégalités sociales, culturelles ou territoriales par un système éducatif obligatoire, gratuit et laïque, y laisse place à un modèle concurrentiel, où les déterminismes sociaux se trouvent contrebalancés par des coups de pouce individualisés aux plus « méritants ».
Coordonnée avec le ministère de l’enseignement supérieur, l’offensive concerne l’ensemble du système éducatif, de la maternelle à l’université. En bout de chaîne, la réforme dite « Parcoursup » a instauré, depuis 2018, une sélection sur dossier à l’entrée des facultés, dont personne ne réussit à saisir les « attendus » (les prérequis pour pouvoir être accepté) tant les critères restent opaques. Les couacs se comptent par milliers : lycéens dont la moyenne est excellente recalés, bugs informatiques, fausses joies, jeunes sur le carreau... La réforme a en revanche fait le bonheur des officines privées de coaching, qui proposent aux candidats paniqués par la complexité du logiciel et des procédures d’inscription des services d’accompagnement, comme le « pass sérénité » vendu par la société Tonavenir.net pour la modique somme de 560 euros — et 340 euros supplémentaires pour un dossier international (1).
Parcoursup a souvent été présentée comme un moyen de remédier au fort taux d’échec des étudiants en première année, estimé par le gouvernement à quatre étudiants sur dix inscrits, et qui concerne en particulier les titulaires d’un baccalauréat professionnel ou technologique. En guise de solution, le gouvernement a donc décidé de leur fermer la porte des universités, en effectuant un tri en amont. C’est d’ailleurs la ligne directrice des réformes actuelles : toujours abaisser le palier du tri.
Aussi la réforme du lycée s’enchâsse-t-elle parfaitement avec celle de l’université. Afin de rompre avec le système des filières (littéraire, scientifique, et économique et sociale), jugé trop contraignant, les experts ministériels ont imaginé de multiplier les enseignements de spécialité à l’issue de la classe de seconde, selon un système flexible, à la carte — à l’image d’un menu de restauration rapide. Mais, du fait des contraintes budgétaires, les lycées n’ont pas été dotés de la même offre. Sur les douze enseignements de spécialité, sept sont obligatoires (2) et chaque établissement doit les proposer. Mais certains n’offrent que ceux-là — à l’image du lycée François-Rabelais, dans la partie populaire du 18e arrondissement de Paris ou du lycée Le Verrier à Saint-Lô — quand d’autres présentent une plus large palette avec, par exemple, les options sciences de l’ingénieur ou numérique et sciences informatiques, recommandées pour s’inscrire dans certaines formations supérieures. D’après une étude menée par le Syndicat national des enseignements de second degré (SNES) auprès de quatre mille élèves de seconde, il semble en outre que les lycéens reconstituent à l’identique les anciennes filières : 66 % ont choisi la spécialité mathématiques ; 50 %, sciences de la vie et de la terre ; et 47 %, physique-chimie, soit les ingrédients composant l’ancienne filière scientifique. Faute de place, les conseils de classe devront pratiquer une sélection quant aux spécialités choisies (3).
Le projet du gouvernement suscite des mobilisations éparses, dont on mesure encore mal l’ampleur, mais qui témoignent d’une colère forte chez les enseignants : manifestations, rétention des notes, démission collective de la fonction de professeur principal, éventualité d’une grève du baccalauréat... Pourtant, au-delà du milieu scolaire, la résistance paraît faible, sinon inexistante, y compris parmi les parents d’élèves.
Depuis trois mois, la mobilisation des enseignant-es et plus largement de la communauté éducative parisienne contre la loi Blanquer et les méthodes autoritaires du Ministre est historique. Qu’elles soient locales (occupations d’école, rassemblements devant les Mairies d’arrondissement, devant le Sénat…) ou nationales (grève, manifestation nationale du 18 mai…), toutes les actions parisiennes ont été un succès.
La suppression des « établissements publics locaux d’enseignement des savoirs fondamentaux » (EPLESF) par le Sénat est à mettre au crédit de la mobilisation des enseignant-es, des parents et des élu-es locaux. Pour autant, d’autres articles de la loi ont été maintenus, amendés ou ajoutés, avec au final un texte qui dessine un avenir inquiétant pour l’école et ses personnels. L’heure est donc toujours à la mobilisation ! La détermination du SNUipp-FSU à obtenir l’abandon de la loi Blanquer et l’amélioration des conditions d’apprentissage des élèves et des conditions de travail des enseignant-es demeure sans faille.
La nouvelle mouture de la loi voté par le Sénat sera soumise jeudi 13 juin à une « Commission mixte paritaire » regroupant député-es et sénateur-trices afin de tenter d’harmoniser les deux textes – celui voté à l’Assemblée nationale et celui voté au Sénat. Le groupe « LREM » s’est abstenu au Sénat. Cela peut laisser penser qu’un accord n’est pas exclu. Si tel est le cas, la loi sera applicable dès la rentrée prochaine.
Pour notre syndicat, il n’est pas possible que le Parlement adopte une loi en catimini contre l’avis d’une très large majorité de la communauté éducative.
Le SNUipp-FSU Paris appelle donc les enseignant-es parisien-nes à être massivement en grève le 13 juin, jour de la réunion de la commission mixte paritaire et à organiser une Nuit de l’École dans chaque école le 6 juin.
Les EPLESF au rancart, mais la vigilance s’impose
« Je le constate, il y a eu des malentendus (…) Il faut donc prendre le temps de la réflexion (…) le débat est désormais très ouvert. » Devant les sénateur-trices, le locataire de la rue de Grenelle s’est donc rangé à leur avis, la création des EPLESF a été biffée du texte de loi. Il est vrai que ces EPLESF avaient cristallisé la colère des personnels des écoles mais aussi celle des parents d’élèves et des élu-es locaux. La mobilisation a donc payé, mais la vigilance s’impose.
Les sujets qui fâchent
En revanche, et au fil des débats organisés durant quatre jours au palais du Luxembourg, le texte de loi a été amendé et réécrit sur plusieurs points.
- Liberté d’expression : non au muselage des enseignant-es !
L’article 1 de la loi, évoquant « l’exemplarité » des enseignant-es, suscitait dès sa rédaction initiale de vives inquiétudes, d’autant que depuis quelques semaines, les menaces et les rappels à l’ordre commençaient à pleuvoir contre des enseignant-es jugé-es un peu trop critiques à l’égard de la politique éducative du ministre. Il a été maintenu et allégé du rappel à la loi de 1983 sur les droits des fonctionnaires. C’est la liberté d’expression des personnels qui se verrait contrariée si cet article était au final définitivement inscrit dans la loi.
- Direction d’école : contre un statut hiérarchique !
Un ajout à l’article 6 du texte prévoit que les adjointes et les adjoints des écoles se verraient désormais placé-es sous l’autorité du directeur ou de la directrice qui participerait, en lien avec l’IEN, à leur évaluation. En clair, l’amorce d’un statut hiérarchique auquel la très grande majorité des personnels est opposée.
- Formation continue pendant les vacances, c’est non !
Les sénateur-trices ont ajouté au texte que chaque enseignant-e devrait bénéficier d’actions de formation qui complètent sa formation initiale au cours des trois années qui suivent sa titularisation. C’est une bonne chose, si ces temps de formation sont organisés sur temps de travail, mais ils-elles ont aussi ouvert la porte à la formation continue durant les congés et qui ne sera pas forcément rémunérée. La disposition vient d’ailleurs en écho, ce qui n’est pas un hasard, à un projet de décret aujourd’hui en discussion au ministère.
- Maternelle à 3 ans : l’argent public, ça doit être pour les écoles publiques !
C’est la disposition qui était à l’origine de la loi, même si son objectif initial était de peu de portée, 98% des enfants de 3 ans étant déjà scolarisés. Elle reste inscrite, mais le Sénat a étendu l’obligation faite aux communes de compensation financière pour les écoles privées à celles qui les subventionnaient déjà. 200 millions d’euros transférés donc au privé, sans la moindre contrepartie, en matière de mixité sociale notamment.
Mais surtout, le risque est grand, comme le souligne Pascale Garnier, spécialiste de la maternelle, de voir disparaitre ses spécificités au sein de l’école primaire, de basculer dans les attendus et des contenus de l’élémentaire.
- Des écoles pour les happy few, non merci !
Si les EPSF ont été supprimés, la création des établissements internationaux (EPLEI), elle, est bien restée dans le texte. Des structures regroupant écoles, collège et lycée avec un recrutement d’élèves sur profil : la bonne maîtrise d’une langue étrangère. Est également prévue la possibilité pour ces établissements de percevoir des fonds privés pour leur fonctionnement. Autant dire que cela officialiserait un système éducatif public à deux vitesses
- Les allocs et le voile : non aux amendements réactionnaires du Sénat !
Envisagée lors du débat à l’assemblée nationale, puis retirée, la mesure visant à supprimer tout ou partie des allocations familiales aux familles d’enfants absentéistes est revenue et a été adoptée par les sénateurs et les sénatrices. Une disposition sans efficacité et qui stigmatise un peu plus les familles des milieux les moins favorisés.
Le Sénat a également adopté un amendement visant à interdire aux mères voilées d’accompagner les sorties scolaires au motif que « le temps scolaire doit demeurer un espace où aucun signe religieux ostentatoire de doit être exposé aux élèves. » Voilà qui, sous couvert de laïcité, pourrait satisfaire les plus conservateurs, mais qui compliquerait encore un peu plus le travail des équipes attachées à rapprocher de l’école les parents qui en sont les plus éloignés. Cet amendement va par ailleurs à l’encontre de la jurisprudence constante du Conseil d’État.
- Exit le Cnesco et toute évaluation indépendante !
Remplacé par un tout-nouveau « Conseil d’évaluation de l’école » lors du débat à l’Assemblée, le Cnesco n’a pas bénéficié d’un rattrapage au Sénat. Les sénateur-trices ont toutefois légèrement modifié la composition de la nouvelle instance, sans pour autant lui donner plus d’indépendance, une indépendance qui faisait la valeur et tout l’intérêt des travaux du Cnesco. La rue de Grenelle aura donc désormais un système d’évaluation à sa main qui risque peu de questionner la pertinence de sa politique éducative.
- Non à la casse de la formation initiale !
La transformation des ESPE en INSPE n’est pas seulement un changement de nom anecdotique. Le Ministère entend remettre la main sur la formation initiale en modifiant le référentiel de formation et en nommant directement les directeurs-trices des futurs INSPE. Les articles 10-12-14 impliquent un nouveau concours en fin de Master 2, un statut d’étudiant-es contractuel-les avant le concours mélangeant préparation du concours et responsabilité de classe. Enfin, le Ministre prône des contenus de formation resserrés sur les « fondamentaux » et la mise en application de « petits livrets oranges ».
La création d’un nouveau statut d’AED fait également partie de cette loi. Blanquer appelant pré-recrutement le fait d’employer des étudiant-es de L2 et L3 à raison de 8h hebdomadaires devant classe avec divers niveaux de responsabilité.
Il est clair que le projet du gouvernement sur la formation initiale est en cohérence avec la loi sur la fonction publique qui élargit les possibilités de recrutement de contractuel-les.
- Inclusion scolaire : pour un statut d’AESH, contre les PIAL !
Comme tous les précédents, ce gouvernement ne fait rien pour permettre une inclusion réussie des élèves en situation de handicap. Au contraire, il remet en cause les moyens alloués aux centres de soins et attaque les modalités d’accompagnement des élèves en situation de handicap avec les créations de PIAL. Ce seraient les principaux-principales de collèges qui seraient chargé-es du recrutement et de l’affectation des AESH au sein du collège et des écoles qui en dépendent… AESH qui seraient évidemment mutualisées pour pallier la pénurie.
Quelle est la suite des opérations parlementaires ?
Plusieurs ajouts, modifications ou amendements apportés par le Sénat à cette loi pourraient donc presque faire passer Jean-Michel Blanquer pour un progressiste. Et si les EPSF passent à la trappe, d’autres dispositions restent particulièrement dangereuses pour l’école et les personnels qui la font vivre au quotidien.
Le texte a été voté en séance plénière au palais du Luxembourg le mardi 21 mai. La nouvelle mouture de la loi voté par le Sénat sera soumise jeudi 13 juin à une « Commission mixte paritaire » regroupant député-es et sénateur-trices afin de tenter d’harmoniser les deux textes – celui voté à l’Assemblée nationale et celui voté au Sénat. Le groupe « LREM » s’est abstenu au Sénat. Cela peut laisser penser qu’un accord n’est pas exclu. Si tel est le cas, la loi sera applicable dès la rentrée prochaine.
Ceci dit, en cas de désaccords persistants, ce sera retour à l’Assemblée nationale qui aura ensuite le dernier mot.
Il y a urgence ! Maintenons la pression ! Organisons dans chaque école une Nuit de l’Ecole le 6 juin et soyons en grève le 13 !
Pour notre syndicat, il n’est pas possible que le Parlement adopte une loi en catimini contre l’avis d’une très large majorité de la communauté éducative.
Le SNUipp-FSU Paris appelle donc les enseignant-es parisien-nes à être massivement en grève le 13 juin, jour de la réunion de la commission mixte paritaire. Cette journée sera décisive, nous devons donc être massivement mobilisé-es pour réaffirmer nos revendications et faire obstacle à la casse de l’École publique voulue par le Ministre Blanquer.
Le SNUipp-FSU Paris a proposé aux autres syndicats parisiens d’appeler ensemble à cette grève.
Une assemblée générale aura lieu le matin pour débattre ensemble de la suite de la mobilisation et pour construire les actions suivantes. Une manifestation sera organisée l’après-midi.
La force de la mobilisation parisienne réside en partie dans le lien créé avec les parents d’élèves et les actions menées en commun. Le SNUipp-FSU Paris appelle donc à continuer de rendre visible notre détermination à promouvoir une école de la réussite de tous les élèves et à obtenir l’abandon de la loi Blanquer. Avec la FCPE Paris, les sections parisiennes du SNUipp-FSU, Snes-FSU, Sud Education, Se Unsa, CNT-Ste et CGT Educ’Action appellent à une Nuit de l’École le 6 juin. Dans chaque école, organisons une grande soirée pour montrer au Ministre et à sa majorité que nous ne lâchons rien !
Avec la publication au BO de la circulaire de rentrée (qui ne concerne que le premier degré) accompagnée de nouvelles "recommandations", le ministre met en route la mise au pas de la maternelle. La circulaire de rentrée précise comment la hiérarchie va controler l'application des "recommandations". Celles-ci expliquent comment enseigner "le vocabulaire", les nombres et les langues étrangères en maternelle. Ces textes imposent un recadrage brutal de la maternelle amenée à devenir une école élémentaire comme les autres.
"Les acquisitions progressivement réalisées à l'école maternelle sont déterminantes pour la maîtrise future des savoirs fondamentaux... La connaissance et la manipulation des unités sonores de la langue française font l'objet d'un enseignement progressif. Dès la petite section, la construction d'une conscience phonologique est régulièrement travaillée. Elle se structure jusqu'à la grande section par des activités appropriées. La connaissance du nom des lettres et du son qu'elles produisent est progressivement enseignée... En mathématiques, les résultats de la recherche montrent que les années de l'école maternelle sont déterminantes pour découvrir et intégrer les concepts essentiels de nombre, d'espace et de calcul. Le rapport Villani-Torossian l'a rappelé".
Si dans le début de la circulaire le ministère fait référence au jeu et aux manipulations, le discours instructif selon les orientations du ministre prend nettement le pas. "Pour que les élèves s'approprient la langue française, un enseignement régulier et structuré du langage est nécessaire dans toutes les classes de l'école maternelle." La circulaire annonce une formation des nouveaux enseignants de maternelle en ce sens selon un référentiel national à paraitre.
Le ministère utilise les résultats des évaluations de CP pour sa propre communication, alerte le spécialiste de l’enseignement de la lecture Roland Goigoux. Dérive scientiste ?
C’est une analyse décapante sur l’utilisation des évaluations de CP par le ministère de l’Éducation. D’abord publiée par le syndicat enseignant du premier degré Snuipp sous le titre « Évals CP : les infox du ministère », le 10 mai (1), elle est signée Roland Goigoux, spécialiste de l’enseignement de la lecture, formateur à l’École supérieure du professorat et de l’éducation et auteur en 2016 du rapport de recherche « Lire et écrire ». Elle lance un véritable pavé dans la mare : Jean-Michel Blanquer aurait utilisé les résultats des évaluations de CP pour justifier ses orientations politiques. « Les premiers résultats sont là », a écrit le ministre de l’Éducation aux enseignants : « Si, en début de CP, 23 % des élèves n’identifiaient que la moitié des lettres et des sons qui leur étaient soumis, ils ne sont plus que 3,3 % au mois de janvier ». Roland Goigoux pointe l’utilisation qui est faite de la science par un ministre qui non seulement n’informe pas les enseignants des changements dans les méthodes censées leur servir, mais utilise ces méthodes pour sa propre communication.
Vous mettez en cause l’utilisation par le ministre de l’Éducation des résultats des évaluations de CP-CE1 en titrant : « Faire mentir les chiffres, en pédagogie aussi ». Sur quoi porte la tromperie ?
Roland Goigoux : Je ne dénonce pas des mensonges du ministère sur des chiffres : les données de la Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (Depp) sur lesquelles il communique sont correctes. Il n’y a donc pas, de ma part, de procès en falsification ou en bidonnage. Ce que je trouve problématique, c’est l’usage qui est fait par le ministère d’un certain nombre d’outils d’évaluation. Il a pris les résultats au début et au milieu du CP pour déclarer : les élèves ont progressé grâce aux politiques mises en œuvre. Au lieu d’assumer des choix politiques, Jean-Michel Blanquer va chercher la caution de la science pour justifier ses décisions. Cette caution scientifique me paraît usurpée : il ne prélève dans les données scientifiques que ce qui l’arrange. C’est plutôt de l’abus de pouvoir.
Qu’est-ce exactement que ce « guide orange » envoyé aux enseignants de CP ?
Les enseignants de CP ont reçu un livre sur l’enseignement de la lecture et de l’écriture connu sous le nom de « guide orange ». Publié en mai 2018, ce guide utilise des résultats consensuels et ajoute une partie extrêmement prescriptive, qui va jusqu’à la description de leçons « modèles ». Jusqu’à présent, les maîtres disposaient de programmes avec des objectifs et d’une relative autonomie pour les atteindre. Les prescriptions du ministère les font revenir au dirigisme d’avant les années 1970, quand les écoles normales étaient chargées de transmettre « la norme ». J’avais sonné l’alerte à la publication de ce guide, mais on ignorait encore si la hiérarchie de l’Éducation nationale allait le porter ou laisser les enseignants en user à leur guise. On a eu la preuve, toute l’année, des multiples injonctions que les corps d’inspection ont fait peser. Le guide orange était le guide à utiliser absolument…
La démarche est très autoritaire, bien que toutes les recherches internationales montrent que les prescriptions descendantes échouent systématiquement à améliorer les apprentissages des élèves tout en démobilisant les enseignants. Avec cet autre problème que le guide orange met en œuvre des techniques d’apprentissage de la lecture assez extrêmes, que je nomme « syllabisme radical ».