Gif sur Yvette, le 28 avril 2009
Monsieur le Sénateur,
L’Ecole est un sujet trop important pour être au cœur de querelles partisanes. L’Education compte trop pour notre société et l’avenir de notre pays pour ne pas inciter à dépasser les clivages politiques.
C’est sur ces principes, illustrés par une motion adoptée à l’unanimité, toutes tendances politiques confondues, par le Conseil Général de l’Essonne le 18 avril 2008, que s’est créé notre collectif à Gif sur Yvette, dans un petit coin de notre département. C’est aussi à partir de cette idée que nous nous permettons aujourd’hui de vous adresser ce cri d’alarme, en comptant sur vous pour le faire remonter à M. le Ministre de l’Education Nationale et à Mme la Ministre de l’Enseignement Supérieur et de la Recherche.
Voilà bientôt un an que par des actions volontairement pacifiques et respectueuses, nous disons notre inquiétude face aux nouvelles réformes de l’Education Nationale, convaincus qu’ainsi nous pourrions faire entendre notre point de vue, ou tout au moins susciter des discussions et des débats à partir de l’idée de l’Ecole Publique que nous défendons : une école de qualité, pour tous, laïque et gratuite.
Des actions d’informations :
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Nous avons fait des dizaines de panneaux pour informer les parents de nos écoles des réformes et de leurs conséquences sur la scolarité de leurs enfants.
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Nous avons distribué des tracts aux entrées et sorties d’école, de collège, de lycée, encore et toujours dans le but de faire circuler l’information.
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Nous avons interviewé une enseignante RASED de notre commune sur son métier auprès des enfants en difficulté durable et diffusé ses propos auprès d’un maximum de parents, via des panneaux ou via des supports papiers.
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Nous avons créé, dans le même esprit de diffusion de l’information, un blog
(http://collecgif.over-blog.com/).
Réunions-débats :
Signatures de pétitions
Actions vis-à-vis des élus :
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A l’automne, 400 signatures obtenues pour une pétition adressée au député de notre circonscription lui disant notre inquiétude. Une copie de cette pétition a été adressée à Mme Campion, sénatrice de l’Essonne, qui a fait remonter nos interrogations à M. Darcos et nous a répondu.
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Suite à cette pétition, nous avons rencontré en octobre, M.Toupin, l'attaché parlemen-taire de M. Pierre Lasbordes, le député de notre circonscription, pour lui dire notre inquiétude. Suite à cet entretien, M. Lasbordes a bien voulu poser des questions écrites au ministre de l’Education Nationale, en particulier au sujet des RASED. Il a ensuite accepté de recevoir une deuxième fois en mars des membres de notre collectif. Nous lui avons fait part de notre colère de ne pas être écoutés et de notre refus, après les avoir bien étudiées, de ces réformes de l'enseignement public (nous le remercions au passage pour sa disponibilité et son écoute).
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Nous avons envoyé un mail à tous les sénateurs, la veille du vote du budget de l’Education Nationale pour les alerter sur la suppression des RASED. Une vingtaine d’entre eux ont d’ailleurs pris la peine de nous répondre, et nous les en remercions.
Actions vis-à-vis de l’Education Nationale
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Nous avons envoyé en novembre une lettre à notre Inspecteur d’Académie. Sans réponse à ce jour.
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Nous avons demandé début janvier un rendez-vous à l’Inspecteur de l’Education Nationale de notre circonscription... et nous attendons toujours, malgré nos nombreuses relances, tant téléphoniques que par mails ou même lettre, qu’il accepte de nous recevoir et pourquoi pas, de nous écouter.
Liens avec d’autres collectifs
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Nous avons relié notre action à celle des enseignants-chercheurs en inscrivant notre collectif dans le mouvement « de la maternelle à l’enseignement supérieur »
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Nous avons participé à l’AG nationale des collectifs, ce qui nous a permis de nous rendre compte, encore mieux qu’à travers Internet qui le montre pourtant de façon exemplaire (sur un site comme « Sauvons l’école publique » par exemple), du nombre considérable de collectifs comme le nôtre à travers la France et de leur motivation aussi forte que la nôtre.
Manifestations/actions locales ou nationales
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Nous avons fait des chaînes humaines autour de nos écoles pour « montrer notre attachement à l’Ecole Publique »
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Nous avons fait une marche aux flambeaux « pour l’Ecole Publique » qui a réuni une centaine de parents.
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Nous avons décoré les portails de nos écoles avec des cœurs pour dire que « L’école Publique, nous l’aimons, nous la défendons »
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Nous avons participé à toutes les manifestations à Paris depuis celle du 19 mai 2008
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Nous avons décoré les portails de nos écoles avec des cloches, tout à fait d’époque pour Pâques, chacune émettant un souhait des parents pour l’Ecole (des classes moins chargées, une école qui apprenne à réfléchir plutôt qu’à apprendre par cœur, des écoles à taille humaine...)... et d’autres plus « humoristiques » : « - de profs, - de moyens pour une meilleure école ? il y a quelque chose qui cloche ! » ou « je sonne l'alarme pour ne pas sonner le tocsin ».
Ronde
Si ces actions ont eu pour résultat d’alerter les parents sur les conséquences de ces réformes et de les voir de plus en plus nombreux se joindre à nous, nous sommes au regret de constater qu’aucune remise en question de ces réformes n’a été faite par le gouvernement suite à toutes ces mobilisations.
Les suppressions de postes dans l’Education Nationale sont toujours d’actualité (11000 enseignants en moins à la rentrée 2008, 13500 à la rentrée 2009), 3000 postes d’enseignants RASED ont été soit supprimés, soit sédentarisés ; les remplaçants en primaire seront désormais des vacataires ; les jardins d’éveil payants sont réalisés dans deux départements pilotes ; les enseignants du primaire se battent pour faire rentrer les programmes avec deux heures de classe en moins par semaine ; la semaine de quatre jours n’est pas remise en cause : Base élèves est maintenue malgré les questions de l’ONU et les plaintes de parents ; la réforme du lycée n’est que reportée, pas remise à plat ; elle va même être expérimentée dans un certain nombre de lycées ; la LRU est passée, et ne semble pas remise en cause malgré les grèves qui durent depuis de nombreuses semaines ; les IUFM sont toujours autant en danger ; les enseignants-chercheurs sont toujours autant dévalorisés ; les budgets des IUT dépendent maintenant du bon vouloir des présidents d’université ; des options comme le grec, les arts,...sont supprimées des lycées ou des universités.... ; les filières littéraires sont menacées. La mastérisation des futurs enseignants supprime toute passerelle entre la filière enseignement et la filière recherche, ce qui va totalement à l’encontre de la vie moderne qui exige toujours plus de possibilités d’adaptation et de mobilité dans les carrières. En outre, la formation pratique des maîtres est réduite à la portion congrue et ne sera plus rémunérée.
Ne croyez pas que nous soyons opposés aux réformes par principe ou par immobilisme. L’Education peut toujours être améliorée, aussi bien les enseignants que les parents en sont conscients et le souhaitent, mais les réformes de M. Xavier Darcos et Mme Valérie Pécresse ne nous semblent en aucune mesure pouvoir apporter plus de qualité (ni en primaire, ni au lycée, ni dans l’enseignement supérieur ou la recherche) et répondent beaucoup plus à une logique comptable. Surtout, elles ont été élaborées sans aucune concertation avec les professionnels du terrain. Or, comment partir sur de bonnes bases de travail sans l’expérience, la connaissance des choses à améliorer et l’adhésion de ceux qui les mettront ensuite en application ?
Alors, c’est en désespoir de cause que nous vous adressons ce mail, comme à l’ensemble des députés et sénateurs de France. Nos avis, exprimés de façon toujours respectueuse et pacifique, ne sont toujours pas pris en compte, nous finissons donc par nous demander comment obtenir ne serait-ce qu’une discussion sur le fond de ces réformes. Le gouvernement voudrait démontrer aux citoyens que seules les méthodes agressives ou les actions violentes ont des résultats, qu’il ne s’y prendrait pas autrement. Surtout, nous craignons beaucoup les dérives possibles que cette logique peut entraîner. Nous sommes aussi très inquiets pour le devenir de ce mouvement. Les universitaires sont en grève depuis des mois, la colère monte et les seules réponses sont la répression policière pour les manifestants et les sanctions administratives et/ou financières pour les enseignants qui en conscience refusent de mettre en place certaines de ces réformes.
Nous espérons que le gouvernement saura, au plus vite, prendre conscience du danger de laisser pourrir une situation comme celle là. En tout état de cause, il sera tenu pour responsable d’une détérioration de la situation du fait de son refus d’écouter les citoyens (pour preuve le peu de cas fait de notre mobilisation et de celle de tous les collectifs qui agissent comme nous depuis des mois). Il porte aussi l’entière responsabilité du danger qui pèse sur les examens des étudiants en refusant de répondre à des demandes à la fois raisonnables et clairement définies.
Il faudra bien que le gouvernement finisse par entendre que ces réformes, nous n’en voulons pas ! Que nous pensons en effet qu’elles mettent en danger l’Education de nos enfants à tous les niveaux, de la maternelle à l’enseignement supérieur et par conséquent l’avenir culturel de notre pays. Parents, nous avons une responsabilité vis-à-vis de nos enfants. Enseignants, nous avons une responsabilité vis-à-vis de nos élèves. Nous refusons de laisser mettre en place un système qui entraînerait une détérioration de la qualité de l’enseignement public.
C’est pourquoi, nous vous conjurons d’user de toute votre influence pour faire entendre au gouvernement notre refus de toutes ces réformes (de la maternelle à l’enseignement supérieur) et notre demande que se tiennent, en concertation avec les enseignants et les parents, dans un climat plus serein, des Etats Généraux de l’Education, dont le but serait d’améliorer ce qui existe depuis longtemps et non pas de le détruire.
Le collectif « Ensemble pour un grand service public d’Education »
ensemblepourservicepubliceduc@gmail.com