Au lieu, comme c’est annoncé, de revaloriser la voie professionnelle, la réforme conduite par Jean-Michel Blanquer a pour effet de restreindre ses finalités et d’appauvrir ses enseignements, estime, dans une tribune au « Monde », Eliane Le Port, professeure en lycée professionnel.
Tribune. Le ministre de l’éducation nationale, Jean-Michel Blanquer, affiche l’ambition de transformer le lycée professionnel en « voie de l’excellence » ou en « Harvard du pro ». Comment, dès lors, ne pas s’étonner du fait que sa réforme a pour conséquence de diviser par deux les volumes d’enseignement des matières générales et de restreindre les formations à leur seule finalité professionnelle ?
En France, les lycées professionnels accueillent 665 000 lycéens et lycéennes qui viennent y préparer, dès l’âge de 14-15 ans, un CAP en deux ans ou un baccalauréat professionnel en trois années. La très grande majorité des élèves viennent des classes populaires et beaucoup sont issus de l’immigration. L’orientation en lycée professionnel s’explique par les difficultés scolaires des jeunes et correspond rarement à un choix de leur part. Pourtant, cette instance remet sur les rails de la formation des élèves qui pensaient que leur trajectoire scolaire était achevée : en effet, plus de 80 % des élèves obtiennent chaque année leur baccalauréat.
Leur taux d’insertion professionnelle sept mois après l’obtention du bac – 49 % – étant jugé insuffisant par Jean-Michel Blanquer, celui-ci a choisi de faire reposer la réforme sur la suppression d’une grande partie des heures du pôle général (mathématiques, sciences, français, arts appliqués, histoire-géographie), signifiant ainsi qu’elles seraient responsables de l’incapacité des jeunes bacheliers à trouver un premier emploi.