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3 septembre 2010 5 03 /09 /septembre /2010 12:54

In Café Pédagogique

 

Par Pierre Frackowiak


La mesure imposée brutalement, sans concertation, est un élément essentiel de la destruction de l’école engagée depuis 2007 avec une détermination sans précédent. Avec la semaine de 4 jours, la régression des nouveaux vieux programmes, la supercherie de l’aide individualisée, les effets de l’évaluationnite aiguë et de l’insensé pilotage par les résultats, le développement de l’autoritarisme de l’encadrement intermédiaire, la suppression de la carte scolaire, etc., les coups portés, dont certains peuvent paraître irréversibles, auront des conséquences à très long terme sur l’école, sur l’éducation au sens global et sur la société tout entière.


Dans dix ou vingt ans, probablement même plus tôt, les dégâts observés sur l’efficacité du système éducatif et sur le vivre ensemble conduiront les pouvoirs publics à tenter de reconstruire un projet éducatif cohérent, moderne, démocratique, généreux en repartant quasiment à zéro, c’est-à-dire aux début des années 1970 avec la rénovation pédagogique et la création de la formation continue des enseignants, avec la transformation des contenus jusqu’aux programmes de 2002 d’abord cautionnés par MM Ferry et Darcos, puis balayés d’un revers de main, avec la loi de 1989 plaçant enfin l’élève au centre du système éducatif abandonnée sans avoir été évaluée. Certes les résultats de cette marche en avant difficile, incertaine, contestée, n’ont pas été à la hauteur des espérances. Des progrès énormes étaient possibles et exigibles… Ce n’était pas une raison suffisante pour faire un énorme bond en arrière mettant en péril l’avenir de la société.


On comprend bien les motivations profondes du pouvoir actuel : réduction de la dépense publique et choix de société. La réduction de la dépense publique correspond à la fin programmée des services publics. Le choix de société est moins lisible au premier abord mais il correspond à une rupture dans l’histoire de notre pays : on bascule vers une société ultra libérale, complètement différente des idéaux républicains, à l’opposé même du fond idéologique du gaullisme. Une société qui exacerbe l’individu, la compétition, les gagnants (toujours les mêmes), l’argent, les experts ou prétendus tels, et qui se donne bonne conscience en tentant de faire croire que chacun a eu les mêmes chances. 


Malheureusement, la réaction a été faible voire nulle sur ces questions fondamentales pour l’avenir de la société. L’absence de projet alternatif cohérent et crédible a été un drame. L’absence de débat réel et d’information objective des citoyens, la priorité donnée aux protestations sur les aspects quantitatifs occultant toujours les vrais problèmes, la frilosité face aux enjeux, l’électoralisme à court terme font que les prises de conscience se produisent toujours trop tard…


Ainsi on commence seulement, à la veille de la rentrée, à s’inquiéter de la suppression de fait de la formation des enseignants et aussi de la formation des inspecteurs. Les uns sont lâchés dans les arènes des classes avec pour seul modèle celui qu’ils ont connu comme élève et comme étudiant : le cours, une heure, une classe, la transmission du savoir scolaire. Les autres placés à la tête de circonscriptions après un court formatage intensif en faisant des courroies de transmission autoritaires sans crédit et des pilotes sans cap et sans moyens perdent toute influence sur les pratiques pédagogiques.


Outre que cette suppression entraîne des risques considérables d’abandons, de démissions – comme s’en inquiète à juste titre Philippe Tournier, secrétaire général du SNPDEN (syndicat des proviseurs et principaux - , de renoncement, de stress, elle se heurte à trois questions qui semblent avoir été volontairement ignorées :


1° tout le monde sait depuis toujours que l’on peut être brillant mathématicien et complètement incapable d’enseigner les maths à un groupe d’élèves, remarquable soliste médaille d’or du plus grand des conservatoires et incapable d’enseigner la musique. C’est une vérité universelle


2° c’est au moment où l’on est bien obligé de constater que les élèves ne peuvent pas comprendre le sens des savoirs scolaires, que les actes de chahut, d’indiscipline, de contestation des profs se généralisent même dans des établissements huppés de centre-ville, que les enseignants sont de plus en plus en difficulté devant les élèves, qu’ils peinent à se faire écouter et entendre, qu’ils souffrent souvent sans trop le dire et dans l’indifférence du système, que l’on supprime tout ce qui est déterminant dans cette pratique professionnelle terriblement difficile aujourd’hui : la psychologie des enfants et des jeunes, la sociologie, la philosophie et l’histoire de l’éducation, la pédagogie indispensable et complètement déniée ;


3° c’est au moment où les disciplines scolaires sont fortement mises en cause que l’on décide de les privilégier avec la mastérisation, de renforcer leur cloisonnement et les raisons de les contester. Le choix des disciplines, leur rapport aux savoirs sociaux, leur rapport avec les savoirs initiaux, extérieurs à l’école, des élèves, leur rapport avec l’environnement, l’exigence de transversalité, de globalité, de sens, sont autant de questions d’actualité et de prospective qui sont délibérément occultées. On sait avec certitude que les profs de l’école du futur ne pourront en aucun cas être seulement des transmetteurs de savoirs disciplinaires juxtaposés et devront être à la fois des professeurs d’intelligence, de maîtrise des langages (on parle, on écrit, on lit dans toutes les disciplines) et des professeurs de citoyenneté, qu’ils devront accompagner plutôt que juger et que tenter de remédier ce qui n’a pas été « médié », qu’ils devront travailler en équipe et que cela s’apprend. Sans pédagogie, sans formation professionnelle, ces objectifs modernes sont impossibles à atteindre.


Notre système éducatif va malheureusement au devant de terribles difficultés.


Il serait urgent que des banderoles soient portées contre les programmes désuets, contre la suppression de la formation au moins autant que contre les suppressions de postes et la suppression de moyens. Les revendications quantitatives auraient d’ailleurs incontestablement plus de chances d’être entendues dans l’opinion publique si elles s’appuyaient sur une vision de l’école, sur un projet éducatif cohérent, complet, pour les 20 ou 30 ans qui viennent, transcendant les alternances politiques car il faut une ou deux générations pour construire un système, inscrit dans un projet de société respectant les valeurs de notre République (liberté, égalité, fraternité) et notre histoire.

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