Les enseignants de Trappes réunis en Assemblée Générale
Trappes, le 12 juin 2008
A Monsieur l’Inspecteur d’Académie des Yvelines,
S/C de Madame l'Inspectrice de l'Education Nationale,
Les enseignants des écoles de Trappes tiennent à vous faire savoir qu’ils resteront très mobilisés pour la défense de l’Ecole et qu’ils rejettent massivement des mesures qui, pour eux, remettent en cause les principes de l’Ecole Publique, Laïque et Républicaine.
Ils sont conscients que, quel que soit le dispositif, celui-ci ne répond pas aux besoins des élèves, ni aux attentes de conditions de travail satisfaisantes pour eux-mêmes, les familles et les élèves à la hauteur des enjeux de la ZEP. Ils appréhendent les difficultés de fonctionnement des écoles et des familles qui vont ainsi être engendrées et s’interrogent sur l’alourdissement de la journée des enfants tout en sachant que le renvoi au mercredi matin ne règle pas les problèmes d’organisation.
Il a été collectivement convenu de retenir un dispositif, qui malgré tout, ne satisfait personne : le soutien sur la pause méridienne.
De nombreuses interrogations restent sans réponse. Rendre des propositions précises d’organisation nous semble prématuré dans cette situation.
En effet, le soutien proposé ne relève plus de l’obligation scolaire. Il est conditionné par la volonté ou la capacité des familles de s’en saisir. Selon nous, il rompt avec le principe de la responsabilité collective Républicaine d'atteindre l’objectif d’un égal accès au savoir et renvoie les parents à une responsabilité illusoire dans le contexte de désordre social que connaît un grand nombre de familles ici.
Beaucoup d’enfants sont sollicités dans l’accompagnement des plus petits à l’école. Certains ne pourront plus le faire.
Quel que soit le moment retenu pour mettre en place ce soutien, les problèmes d’organisation des familles confrontées à la disparité des nouveaux horaires, à la prise en charge d’un enfant en difficulté dans une fratrie deviendra rapidement insurmontable.
Les enseignants de Trappes tiennent à affirmer solennellement qu'il y a des limites à une politique qui masque les reculs budgétaires par des effets d’annonce et qui organise des aides aux élèves les plus en difficulté en diminuant l’enseignement assuré à tous. Nous ne le savons que trop ; ce qui est « donné » aux uns, à grand renfort médiatique, se fait au détriment de tous, comme dans le cas des RAR ou des RAN. Ce dont nous avons besoin, ce ne sont pas de mesures hâtives, irréfléchies et dont la multiplication subite empêche toute construction dans le temps. Ce que nous souhaitons, c’est un vrai projet concerté pour l’Ecole qui puisse réaffirmer la répartition des moyens selon les besoins et donner la priorité à l’éducation des futurs citoyens. Nous souhaitons aussi voir préserver les conditions d’une sérénité indispensable dans l’exercice de notre métier pour analyser, réfléchir ensemble et construire efficacement dans la durée.
Réunis en assemblée générale, ils tiennent à vous poser, dans un premier temps, un certain nombre de questions d’ordre pédagogique.
Comment peut-on croire que l’ensemble des élèves progressera avec moins d’heures d’enseignement et des programmes alourdis ?
Ne serait-il pas plus pertinent de garantir les heures obligatoires en assurant les remplacements durant l'année, plutôt que de supprimer 18 postes de brigade à la rentrée 2008?
Comment accepter que les mêmes moyens soient mis en œuvre sur toutes les écoles du département et que ne soient pas pris en considération les difficultés plus spécifiques de certains secteurs et la nécessité qu’il y aurait de continuer à donner plus là où c’est nécessaire pendant les heures d’enseignement obligatoires ?
Un grand nombre d’élèves bénéficient dans notre commune d'activités culturelles, artistiques et ludiques sur la pause méridienne. Le soir :le coup de pouce, les études et les structures socio- éducatives accueillent un nombre significatif d’enfants. Demain ce sera l’accompagnement éducatif. Le mercredi ce sont les centres de loisirs et les clubs sportifs. Comment éviter la discrimination et le sentiment d’être puni pour les enfants concernés ?
Dans quelle mesure pourrons-nous garantir, dans la journée, des temps de pause nécessaires pour permettre aux élèves déjà en difficulté de se ressourcer pour mieux se mobiliser devant la tâche scolaire ensuite ?
Devons-nous prendre le risque d’alourdir la scolarité des élèves déjà fragiles et de les stigmatiser ?
Comment croire, dans le contexte de réduction budgétaire actuel, que ce dispositif n’est pas un premier pas vers la suppression des moyens pour les aides spécialisées.
Comment articuler les aides avec le RASED et avec les différentes structures mises en place sur la commune?
Quels seront les temps de concertation dégagés dans ce cadre ?
Pourquoi avoir supprimé 17 postes de maîtres G pour la rentrée 2008?
Nous avons de sérieuses raisons de considérer ces dispositifs comme des «bricolages» pédagogiques ne représentant qu'une multiplication et un éparpillement d'aides non coordonnées.
Même si ces idées peuvent apparaître dans la forme comme un remède à l'échec scolaire, nous pensons que ces mesures sont inadaptées, et qu’elles risquent même d’induire des effets négatifs.
Le regroupement des élèves en échec hors temps scolaire peut-il vraiment constituer une réponse aux difficultés lourdes ?
Sur le plan administratif aussi les questionnements sont nombreux.
Les activités facultatives de l’école comme les sorties hors temps scolaire donnent lieu actuellement à l’obligation pour les parents de fournir une attestation d’assurance. En sera-t-il de même pour le soutien ?
Comment seront gérées les absences des élèves ? Cela donnera-t-il lieu à un cahier d’appel spécifique ?
Comment seront organisés les remplacements des enseignants et la passation des informations concernant les projets de soutien pour les élèves ?
Comment les directeurs vont-ils pouvoir assurer la surcharge de leur mission qui va encore s’aggraver avec l’accompagnement éducatif ?
Quelle sera leur responsabilité sur le hors temps scolaire ?
Les communes et les écoles auront-elles à supporter seules, les budgets complémentaires pour organiser ce soutien ?
Quel sera le cadre réglementaire pour les sorties des élèves en soutien et qui prennent leur repas chez eux ?
Ces heures de soutien seront-elles considérées comme des heures d'enseignement ?
Comment considérer d'un point de vue administratif et réglementaire la coexistence dans la même cour d'élèves relevant de responsabilités différentes (Personnel municipal et enseignant)?
Pourquoi les maîtres formateurs seront-ils rémunérés en heures supplémentaires pour le soutien ?
A quel moment les équipes devront-elles valider ces nouvelles organisations et auront-elles suffisamment de temps de concertation pour y réfléchir ensemble ?
En vous remerciant des réponses qui nous permettront d'organiser ce temps de soutien, veuillez croire Monsieur l'Inspecteur d'Académie en notre profond attachement au service Public d'Education.
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