Elle a quitté le jury soulagée, presque confiante. Fin mai, Laura (le prénom a été modifié) a passé les épreuves orales d'admission du concours de professeurs des écoles (CRPE). Trois heures de préparation d'une séquence de cours, vingt minutes d'exposé, vingt minutes d'entretien. "Ma prestation m'a semblé correcte", raconte la jeune femme de 34 ans, diplômée de master. "J'ai répondu aux questions. Le jury était souriant, il a acquiescé à plusieurs reprises."
Mais le 6 juin, jour des résultats, c'est la douche froide. La candidate découvre qu'elle n'est pas sur la liste des admis. Dans l'académie de Créteil, où elle a passé le concours, il fallait 82 points pour réussir. Elle en a obtenu 98. "Sauf que dans mes résultats, j'avais un zéro en mathématiques..." Une note éliminatoire. Laura a du mal à s'en remettre. A comprendre aussi. "Avec un 0,1, j'aurais été admise. Zéro, ça équivaut à une absence ; ça veut dire qu'on ne veut pas de vous !"
Dans l'académie de Paris, Elisabeth, candidate de 42 ans, elle aussi éliminée, a alerté le défenseur des droits. Elle a aussi demandé à consulter le dossier du jury. "Il s'est passé quelque chose de pas très normal, raconte-t-elle. J'ai préparé l'épreuve pendant trois heures en me basant sur les programmes officiels ; j'ai exposé mon cours, décrit mes activités, expliqué comment j'organiserais la classe, quels matériels j'utiliserais... Je ne dis pas que ma prestation a été extraordinaire, mais pourquoi zéro ?" Elle aussi avait largement dépassé le "seuil" d'admission (125 points, pour un seuil de 75 à Paris). "Même s'ils m'ont trouvée lamentable, je méritais au moins quelques points !
LE COLLECTIF DES "ZÉROS ÉLIMINATOIRES"
Que s'est-il passé au concours de professeurs des écoles ? Y a-t-il une recrudescence des zéros éliminatoires cette année, alors même que le ministère de l'éducation nationale entend recruter massivement des professeurs ? Selon le Snudi, le syndicat des enseignants du 1er degré de FO, des "centaines" de candidats auraient été évincés par un zéro. "Une soixantaine dans l'académie de Versailles, une centaine à Créteil, 30 à Paris", soutient Marie Horville, du Snudi-Paris. Des candidats seraient aussi concernés dans les académies de Lille et Marseille. "D'habitude, c'est très à la marge. Mais cette année, on a été submergé d'appels de candidats qui ne s'attendaient pas à de tels résultats ", renchérit Marie-France Chiche, du Snudi national.
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