
Environ 3.000 lycéens selon les organisateurs ont commencé à défiler jeudi à Paris pour demander au ministre Xavier Darcos de revenir sur les suppressions de postes dans l'Education, a constaté un journaliste de l'AFP.
Les manifestants, venus de lycées parisiens ou de la proche banlieue, sont partis vers 14h30 du métro Sèvres-Babylone (VIIe) en direction de la rue de Grenelle, où se trouve le ministère de l'Education. Ils répondaient à l'appel de l'UNL, premier syndicat lycéen.
Les lycéens scandaient des slogans comme "dans tous les quartiers, dans toutes les régions, un même droit à l'Education" ou encore "lycéens en colère, on ne va pas se laisser faire". Aucune banderole de tête n'était brandie en début de cortège.
Ce jeudi "était plutôt une journée de remobilisation pour montrer au ministre (de l'Education, ndlr) que les lycéens seront toujours là tant qu'ils n'auront pas de réponse à leurs revendications", a déclaré Antoine Evennou, secrétaire général de l'UNL.
"La réforme du lycée et les suppressions de postes dans l'Education sont liées. Or sur ce dernier point nous n'avons pas de garanties pour 2010 et 2011", a-t-il ajouté.
Interrogé sur l'ampleur de la mobilisation, inférieure à celle de la dernière journée d'actions de décembre, le responsable syndical a répondu: "pour une température de 3 degrés et une première journée de mobilisation suite aux vacances, c'est une réussite".
L'UNL et la Fidl appellent ce jeudi à une journée de mobilisation pour demander à Xavier Darcos de revenir sur les suppressions de postes prévues en 2009 dans l'Education, après le report en décembre de la réforme du lycée.
A Bordeaux, des lycéens "pas nombreux" mais "toujours là" contre la réforme
"On a froid, on n'est pas nombreux mais on est toujours là": Antoine, élève de 1ère et manifestant jeudi à Bordeaux, affiche, au retour des vacances scolaires, sa volonté de rester mobilisé contre la réforme du lycée, malgré l'annonce de son report par le ministre de l'Education.
"Il faut réformer le lycée, bien sûr, mais pas avec cette réforme-là", rappelle Antoine, 17 ans, qui, une trompette dans une main et un mégaphone dans l'autre, veut réveiller "un mouvement qui s'est endormi".
La réforme qui était souhaitée par Xavier Darcos aurait accru les inégalités entre "un lycée comme le nôtre, classé en ZEP, et, par exemple, un lycée de Bordeaux centre", selon ce lycéen de Lormont, dans la banlieue bordelaise.
"On est là aussi pour se battre contre les suppressions de postes. Avec moins d'enseignants, on sera 40 ou 50 par classe, ce sera le bordel", assure encore cet élève de 1re ES, qui a la bénédiction de ses parents pour se joindre aux cortèges "tant que les notes suivent".
A Bordeaux, où les manifestations avaient rassemblé jusqu'à 6.000 lycéens avant les fêtes, le premier rassemblement de l'année n'a toutefois pas rencontré de grand écho avec seulement 150 manifestants, selon la police.
"C'est minable (...). Mais j'espère que le fait de se faire ridiculiser (en défilant à 150) va permettre à ceux qui sont restés chez eux de se réveiller", peste Antoine.
Javier, 18 ans, en terminale S dans le même lycée à Lormont, entend aussi "prouver qu'on est des jeunes adultes en allant au bout".
Pauline, 17 ans, élève en terminale ES à Blanquefort, redoute pour sa part que Xavier Darcos ne fasse passer la réforme en juin quand "la mobilisation sera moins forte avec le bac". "C'est maintenant qu'il faut se battre!", lance cette membre de la coordination lycéenne bordelaise, plaidant pour "des opérations coups de poing plus ciblées" en janvier pour entretenir la lutte malgré "la démobilisation", "le bac" et "le froid".
Car le mouvement, au-delà d'une demande de retrait de la réforme Darcos et de la protestation contre les suppressions annoncées de postes, entend aussi exprimer l'inquiétude des lycéens sur leur avenir, affirme-t-elle.
"Avec la loi Pécresse qui est passée l'an dernier, la fac est devenue plus sélective. On n'est pas très optimistes. Ceux qui ne sont pas inquiets, ce sont qui pourront se payer une école de commerce ou une grande école", selon elle.
"Grandir nous inquiète", confirment en choeur Pauline et Melissa.
In Libération
La manifestation des lycéens lyonnais s'est terminée par plusieurs incidents avec les forces de l'ordre. Après avoir été empêchés de poursuivre leur parcours par des cordons de CRS sur la rive gauche du Rhône, le millier de lycéens a décidé de se rendre en direction du quartier de la Part-Dieu. Pour "gêner les transports". C'est là que les premiers incidents ont eu lieu. Attendue en force par la police, la manifestation a rapidement dégénéré. "Ils ont tiré au flash ball et lancé des lacrymo pour nous disperser", raconte une lycéenne. Quelques dizaines de minutes plus tard, une quarantaine de manifestants se retrouvaient en plein centre sur la place des Terreaux. Alors qu'ils faisaient un "sit-in" destiné à bloquer le passage des bus, les policiers les ont d'abord invité à partir puis, très rapidement, l'ambiance s'est corsée. Alors que certaines jeunes criaient "CRS SS" et lançaient des canettes de bière, les policiers, nettement plus nombreux, les ont chargés. Certains ont été frappés avec des matraques, avant d'être interpellés, a pu constater Libération. En tout, sept lycéens ont été interpellés…
La manifestation avait commencée en fin de matinée depuis cette même place des Terreaux. Un millier de lycéens (huit cents selon la police) s'étaient donnés rendez-vous. Une manif au pas de course comme seuls les lycéens savent les mener. Une manif, surtout, dès le départ très encadrée par les forces de l'ordre. Le cortège était entouré par un épais cordon de policiers en casques et boucliers, qui ouvraient la marche. Certainement les mieux parés pour affronter la froid glacial. Dans les rues adjacentes, les cars de CRS suivaient en parallèle la manifestation. Avant les vacances scolaires, les précédentes manifestations étudiantes avaient déjà été marquées par des échauffourées et des incidents avec les forces de l'ordre (lire sur LibéLyon). Cette fois-ci, policiers et lycéens avaient pris leurs dispositions. Les premiers en venant en masse. Les seconds en distillant des conseils à leurs camarades par micro : "si vous avez des ennuis avec les policiers, criez votre prénom , appelez des témoins et signalez-le à la FIDL (syndicat étudiant, ndlr)." Quelques heures plus tard, lorsque les incidents ont éclaté, il n'y avait plus grand monde des organisateurs pour faire respecter ces consignes.
Les lycéens ont défilé au cri de "lycéens en colère, on ne va pas se laisser faire". Slogans, banderoles et tracts dénonçaient la "braderie" du système éducatif par le gouvernement. "Stop aux suppressions de profs", "J'en perds mon latin", "Education en crise". Plus largement, certains lycéens dénonçaient "la politique de régression d'un gouvernement qui économise sur l'éducation et la santé, c'est à dire sur l'avenir de la société".